Dominique LEMAIRE, CARESSIMO, a souhaité tenter de conjuguer sous sa plume le verbe "entreprendre" au féminin. J'y ai, pour ce faire, donné une brève interview. Qu'en pensez-vous ?
Business woman, mythes et réalités : le verbe entreprendre au féminin
Être indépendant en Belgique constitue déjà, en soi, un défi. Qu’en est-il aujourd’hui, en 2017, lorsque que l’on conjugue ce verbe au féminin ? Petit état des lieux, et témoignage.
Sur le plan de la vie active, les femmes qui travaillent sont de plus en plus nombreuses : 55,32% en 2007 contre 58% en 2015. Voici donc une courbe en augmentation qui, par contre, s’oppose directement à celle concernant l’entrepreneuriat : en Belgique, 1/3 seulement des indépendants est une femme. Et parmi les différents secteurs d’activité choisis, elles sont 125.983 à avoir opté pour celui des « professions libérales et intellectuelles » (39,3%) ; le reste étant partagé entre le secteur du commerce (32,5%), puis celui des services (12,5%). Enfin, ¼ seulement de ces indépendantes sont administratrices de société(s).
Le monde de l’entrepreneuriat reste donc un univers plutôt masculin. En cause peut-être, la crainte de ne pouvoir concilier vie professionnelle et vie personnelle. Car quoi que l’on en dise et d’ailleurs de manière non exprimée, la case « logistique interne » (courses, transferts maison/école/activités extra-scolaires diverses et nombreuses/maladie(s)/devoirs, intendance, etc, etc.) reste généralement dévouée aux femmes. Autre facteur : les mères célibataires qui ne veulent ou ne peuvent prendre le moindre risque financier.
Elles sont donc nombreuses à ne pas oser se lancer dans la grande aventure de l’entrepreneuriat. Ce qui est peut-être, stratégiquement parlant, une erreur.
Muriel Gluza pourrait en témoigner. Juriste de formation, cette jeune et dynamique trentenaire a créé, il y a un an, la plateforme Felicitas, une coopérative qui a pour but d’encadrer les indépendants et de les soutenir par le biais, notamment, d’audits opérationnels. « Pour moi, la plus grande difficulté de ce statut est de trouver un équilibre entre la réalisation de ses envies professionnelles et sa vie personnelle. Il faut s’imposer de laisser au conjoint la possibilité d’embrayer et d’approuver. Il faut laisser la porte ouverte ».
En outre, et contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer dans un monde où les postes décisionnels restent l’apanage des hommes, Muriel n’a eu aucun mal à convaincre son banquier de la pertinence et de la viabilité de son entreprise.
>Quelles sont les qualités requises pour se lancer ?
« La détermination, la confiance en soi. Il faut parfois s’accrocher, mais il ne faut jamais baisser les bras ! J’ai eu, comme tout le monde, des moments de découragement. Dans ces moments-là, ma force est de me dire que si ça arrive, c’est qu’il y a une raison. Il faut trouver la raison et en tirer les conséquences. Il faut savoir se remettre en question. »
>Quels reproches vous fait-on le plus souvent ?
« Ça dépend. Lorsqu’elles font le même métier que moi mais n’ont pas la même manière de vivre, certaines femmes me trouvent trop extravertie. Les hommes, eux, me reprochent de réfléchir trop loin, d’envisager toutes les pistes ».
Que des avantages
Être une femme dans le monde de l’entrepreneuriat comporte des avantages, dont celui justement d’être une femme, et d’avoir cette faculté de communication typiquement féminine : « Qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme, ma réponse, sur le fond, sera la même. C’est la forme qui va changer. Les hommes réfléchissent de manière très différente de nous, et préfèrent une réponse nette, tranchée. Contrairement aux femmes qui elles souhaitent une réponse mieux « emballée ». Quoi qu’il arrive, il faut les convaincre tous les deux. On doit donc s’adapter à son interlocuteur et tirer parti de ce que l’on pourrait qualifier comme un inconvénient ».
>La séduction, par exemple ?
« Je peux en effet être aimable et très souriante, Mais je sais aussi fermer la porte, tacitement - et même tactiquement - à toute équivoque. Ça ne devient dangereux que si on n’est pas claire dans sa tête. Il faut pouvoir fixer ses propres limites et les respecter ».
>Et au quotidien, côté vie personnelle, ça se passe comment ?
« Je gère ça de manière très sereine. Je suis une « vraie » indépendante (NDLR : en référence au faux statut d’indépendant) et je gère donc mon temps comme je le décide.
Le grand avantage de ce statut, c’est cette liberté : je peux m’arrêter à 16h pour aller chercher mon fils à l’école. Mais je peux aussi décider de reprendre le travail à 22h ».
©Carressimo
Sources : Inasti, Observatoire des PME et Tableau de bord es PME et des entrepreneurs indépendants.