Olivier Zeegers a pour mots de référence "échanges, rencontres, réseautage..." Passionné de contacts humains, cet amoureux du beau – fondateur de la Modesign Academy – réussit à donner un supplément d'âme au management du luxe. Il rend aussi ici un bel hommage à celle qui l'a aiguillé sur le droit chemin et qui lui a inspiré sa démarche actuelle, entre Paris et Bruxelles, Francine Pairon, à la fois fondatrice de La Cambre Mode(s) et du postgraduat "Création" à l'IFM à Paris.
Le regard que vous portez sur le secteur de la mode est à la fois pragmatique et enthousiaste. Comment avez-vous abouti dans ce secteur ?
Depuis toujours, j'aime les belles choses. Je suis notamment fasciné par le corps en mouvement, par le vêtement, par ce qu'il exprime d'une personnalité. Dit comme ça, ça peut sembler naïf, mais c'est le début de l'aventure. À 22 ans, à la fin de mon premier cursus académique en sciences politiques, je me sentais trop jeune pour me lancer dans la vie active. Même si, au fond de moi, je n'ai jamais vraiment rêvé de créer des robes, je me suis mis en tête de passer l'examen d'entrée à la Cambre...
Qu'est-ce qui vous fascinait autant dans la mode ?
C'est un secteur qui nous touche au quotidien, peu importe qui on est. La mode n'a rien de confidentiel. J'aime sa dimension globale – la globalité est l'un de mes leitmotivs – et tout ce qu'elle brasse comme thématiques: de la production des matières premières à l'aménagement urbain induit par le secteur retail en passant par l'approche digitale.
Vous aviez envie de devenir créateur ?
En fait, pas vraiment. Dès la semaine préparatoire à cet examen d'entrée, j'ai tout de suite senti que ce n'était pas pour moi. Mais j'y ai fait une rencontre : celle de Francine Pairon, initiatrice de La Cambre Mode(s) qu’elle fonda en 1986, une femme exceptionnelle qui m'a dissuadé de me tourner vers la création, mais qui m'a proposé de la seconder dans l'organisation du défilé du jury de la Cambre. J'y ai côtoyé des étudiants comme Olivier Theyskens et Laetitia Crahay. Je crois qu'en termes de talents, je n'aurais pas pu mieux tomber. En 1997, j'ai décroché une place me donnant accès à une formation à l'IFM de Paris. J'ai évidemment sauté sur l'occasion.
Le début de votre expérience parisienne...
La découverte d'une ville, celle de tous les possibles et d'une école – l'Institut Français de la Mode – qui m'a offert le bagage nécessaire pour amorcer un début de carrière dans l'univers du luxe à Paris. En tout, j'y suis resté six ans – dont quelques années au sein de l'IFM en tant que bras droit de Francine Pairon qui y lança, en pionnière, en 1999, le postgraduat Création d’accessoires et de vêtements – avant de revenir à Bruxelles pour des raisons familiales.
Et là, vous commencez à rêver d'une école semblable à l'IFM en Belgique...
Oui, sauf que j'ai tout de même attendu presque dix ans avant de concrétiser cette idée. D'emblée, mon souhait était de proposer un cursus (six mois de cours et six mois de stage en entreprise, ndlr.) destiné à des passionnés de mode qui souhaitent exercer une autre profession que celle de designer : chef de produit dans le secteur du luxe, expert retail, voire un poste dans la communication ou le marketing pur. La spécificité de l'académie, c'est d'allier un enseignement donné par des professionnels du secteur et un ancrage dans le produit en tant que tel.
Expliquez-nous...
Chaque année, nous proposons à nos étudiants en Master de réaliser un produit de luxe comme un sac en collaboration avec Nina Bodenhorst de l'atelier Niyona, par exemple, dans une approche artisanale. Une manière de comprendre, de l'intérieur, les spécificités d'un produit de luxe.
D'autant que cette démarche pédagogique ne s'arrête pas là...
Les étudiants sont en effet amenés à créer un pop-up store dans lequel ils vont présenter ce produit, le promouvoir, le vendre au travers d'un plan de communication, d'un calcul de prix cohérent, d'une démarche commerciale active... Une approche à 360° que nous voulons totalement organique, à l'image de notre cursus. Un programme de cours pratiques et théoriques qui – c'est important de le souligner – passe également par un coaching offert à nos étudiants jusqu'à ce qu'ils décrochent un métier ou une mission en phase avec leurs attentes et leur profil.
Au sein de la Modesign Academy, vous proposez également des programmes plus légers.
Le Master s'adresse, sauf exceptions, aux moins de 35 ans qui n'ont pas encore une longue carrière derrière eux. Pour les autres, nous organisons des cours du soir, ainsi que des programmes d'été – incluant des cours donnés par des experts, des conférences et des visites de boutiques, d'ateliers, etc. – s'adressant à des profils divers qui souhaitent approfondir leurs connaissances et découvrir certaines facettes du management de la mode.
Quel est votre futur défi pour votre Modesign Academy ?
Dans cette idée de globalité qui me tient tant à cœur, j'aimerais accueillir 50% d'étudiants étrangers au sein des différents programmes. En marge de toutes les opportunités offertes par notre école en termes de réseau, les 150 intervenants belges et internationaux qui passent chaque année par l'académie constituent une véritable porte d'entrée vers l'univers du luxe.
Quelle est votre définition du luxe ?
Avec cette école, je n'ai pas l'ambition de vendre du rêve, mais bien de donner aux étudiants l'accès à un métier. Cela dit, la part de rêve est bien présente. Elle passe notamment par la chance qui m'est donné de rencontrer, au quotidien, des gens passionnés. C'est ça qui me fait vivre !
Par Marie Honnay
WBDM s'associe à TLmagazine pour promouvoir et diffuser la créativité et le talent belges à l'international. Pour découvrir plus d'articles sur la créativité belge, rendez-vous sur TL Magazine.